ARTICLES / IST ET HÉPATITES

Les jeunes et le VIH, et chez les jeunes gays ?

par | 26.06.2017

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Réact’up s’intéresse ici aux jeunes gays, qui représentent la majorité des contaminations parmi les jeunes. Il y a des messages et des stratégies de prévention à tirer de l’analyse de leurs perceptions et connaissances du sida, des protections mises en œuvre, des applications de rencontres qu’ils utilisent, etc.

Les contaminations par le vih restent stables chez les jeunes depuis plus de 10 ans. Cependant parmi les nouvelles infections touchant les jeunes, un groupe est de plus en plus représenté. C’est le groupe des jeunes gays et bisexuels, que l’on appelle aussi HSH (Hommes ayant des relations Sexuelles avec d’autres Hommes), qui voit une importante augmentation des infections. En l’espace de 10 ans, les découvertes de séropositivité ont presque triplé chez les jeunes HSH de 18 à 24 ans (x 2,7), atteignant, en 2014, 51% des nouvelles découvertes dans cette classe d’âge (350 cas).
Le groupe des jeunes femmes nées à l’étranger contaminées par rapport hétérosexuel est très touché. Elles correspondent à 71% des jeunes femmes contaminées par rapport hétérosexuel. La proportion de jeunes adultes contaminés par usage de drogues injectables est faible (0,4%). Par ailleurs 14% des diagnostics des 18 à 24 ans étaient tardifs (<200 CD4/mm3 ou stade sida). [1]
De plus les Infections Sexuellement Transmissibles hors vih, qui sont en hausse chez les jeunes, qu’ils soient hétéros ou homos. C’est pourquoi le Conseil National du Sida et des hépatites virales (CNS) a émis de nouvelles recommandations en matière de prévention et de prise en charge dans un rapport datant de février 2017, que nous vous proposons d’analyser.

Comprendre ce qui se passe pour les jeunes gays

Epidémiologiques du vih : il est bien là

epidemiologie VIH jeunes 18 24

On observe les mêmes tendances chez les adolescents (entre 15 et 17 ans) pour les jeunes HSH et les jeunes femmes nées à l’étranger contaminées par rapport hétérosexuel que celles évoquées en introduction concernant les jeunes adultes.

Et pour les autres IST : pas que les jeunes gays touchés par une hausse préoccupante

On manque de données épidémiologiques sur les Infection Sexuellement Transmissibles en général et particulièrement chez les jeunes du fait qu’il n’existe actuellement pas de déclaration obligatoire concernant les IST. Néanmoins, on observe l’augmentation récente de leur fréquence chez les jeunes qu’ils soient hétéros ou homos. Les jeunes de 15 à 24 ans rendent compte d’environ 40% des IST (vih, syphilis, gonocoque, et chlamydia) diagnostiquées en 2013-2014 en France, ce qui correspond à une hausse de 10% par rapport à 2012. Les jeunes HSH sont particulièrement exposés au risque d’infection par le vih, ainsi qu’au risque de syphilis et de gonococcies. Les infections à chlamydia sont plus fréquentes chez les jeunes femmes. [2] Il apparaît donc important qu’il y ait plus de dépistage des IST chez les jeunes.

Le Net Gay Baromètre : quelles informations sur les jeunes gays ?

La 4e édition du Net Gay Baromètre, une enquête par questionnaire en ligne dont la promotion passe par des sites de rencontres généralistes et spécialisés gay, a eu une édition française en 2013-2014 et permet de dépeindre les comportements des jeunes gays. Un quart des répondants de cette enquête (soit près de 4500 répondants) sont des jeunes entre 16 à 24 ans. Cette étude met en évidence des sous-groupes différents parmi les jeunes HSH : le rapport au sexe et les prises de risque varient.

  • Préoccupations des jeunes gays trop souvent discriminés : le sentiment de discrimination des jeunes HSH est particulièrement fréquent : 39% déclarent avoir été discriminés en raison de leur orientation sexuelle et 22,7% en raison de leurs manières (« être efféminé »). Ces discriminations surviennent pour un nombre important à l’école (19% pour celles liées à l’orientation sexuelle, 12,9% pour celles liées aux manières). Ces jeunes sont également préoccupés par l’acceptation de leur orientation sexuelle (31.8%), leur coming-out (38%), l’isolement ou la solitude (41,8%) et les idées ou tentatives de suicide (18,6%). Cela renseigne sur les importantes préoccupations auxquelles sont confrontés bon nombre des jeunes HSH.
  • Espace de rencontres : les habitudes de fréquentation des lieux de convivialité des jeunes HSH divergent de celles de leurs aînés : ils sont seulement 44% à fréquenter des lieux de sexe contre 66% chez les 25 ans et plus. Les jeunes HSH préfèrent des lieux dits « softs » (bars, discothèques ou associations de loisirs), il en va de même pour les lieux dits « hétéro » ou « mixtes ».
  • Usage d’internet pour les rencontres : 94,3% des jeunes HSH déclarent détenir au moins un compte sur un réseau social. 42,6% des jeunes HSH interrogés utilisent une application communautaire de rencontres en ligne.
  • Nombre de partenaires : en 2013-2014, les jeunes HSH rapportent moins de partenaires sexuels que leurs aînés (9,36 contre 14,67 partenaires), et s’engagent dans davantage de rapports sexuels avec ceux-ci (7,07 rapports sexuels chez les 16-24 ans contre 4,9 chez les 25 ans et plus). Ces observations trouvent certainement leurs explications dans la drague par application mobile et site internet très utilisés par les jeunes gays : les échanges à distance en virtuel ont moins de chance d’aboutir qu’une rencontre directe dans un lieu communautaire par exemple. La distance et le manque de motivation peuvent décourager. Ainsi une fois le partenaire rencontré, il est plus simple de le revoir que d’en trouver un autre.
  • Pratiques sexuelles à risque : les jeunes sont plus nombreux que leurs aînés à s’engager dans des pratiques à risque (« barebacking » déclaré comme tel (43%), au moins un rapport sexuel non protégé (46%), rapports sexuels non protégés réguliers (26,7%), rapports sexuels non protégés avec un partenaire sérodifférent ou de statut sérologique inconnu (30,3%)).
  • Consommation de substances psychoactives : sur 10 jeunes HSH interrogés, 7 déclarent avoir consommé au moins une fois une substance (alcool ou drogue) au cours de la dernière année. L’alcool, le cannabis, la MDMA, l’ecstasy, les amphétamines ou speed et le crack sont, pour des niveaux divers et par ordre de préférence, les substances les plus populaires chez les moins de 25 ans. 15,4% des jeunes HSH interrogés déclarent avoir consommé au moins une fois une substance par injection.
  • Dépistage du vih : seuls 40% des 16-24 interrogés ont réalisé un dépistage vih au cours de leur vie, contre près de 85% chez les 25 ans et plus.
  • Relations sexuelles tarifées : parmi les jeunes HSH, 13% ont participé à une relation sexuelle tarifée, dont 87,7% ont reçu une compensation (financière ou autre). 23,5% indiquent qu’elles représentent une large part de leurs revenus, ce qui indique que les jeunes HSH sont plutôt financièrement dépendants de ces relations tarifées.

On remarque que le public des jeunes HSH est disparate aux vues de leurs habitudes de vies, de leurs cadres de vie, ce qui laisse penser à des vulnérabilités différentes au sein même du groupe.

Un nécessaire travail de prévention auprès de tous les jeunes

Connaissances, perceptions, représentations du vih/sida et utilisation des outils de prévention par tous les jeunes

Les jeunes ont des connaissances parfois incomplètes voire erronées des IST et développent un imaginaire sur les risques de transmission. Selon les résultats d’un sondage commandé en 2016 par le Syndicat National des Dermatologues-Vénérologues (SNDV) auprès des 18-35 ans [3], 7 jeunes sur 10 ignorent ou interprètent mal les signes d’une IST (brûlure, écoulement, ulcération) et 3 sur 10 ignorent que les IST sont transmissibles par voie anale. D’après une étude réalisée pour Sidaction [4], le sentiment d’information global des jeunes de 15 à 25 ans sur le vih se détériore depuis 2014 : 16% des jeunes considèrent être très bien informés sur le sida, un pourcentage en chute de 10 points comparé à 2012, 24% déclarent ne pas avoir peur du sida contre 17% en 2015, 30% des jeunes interrogés ont des représentations faussées de la maladie et de ses modes de transmission, 22% estiment qu’il existe un traitement pour guérir du sida.
Les résultats de l’enquête KAPB de 2010 [5] soulignent également la moindre proximité à la maladie observée pour toute la population depuis 1998 et qui touche plus particulièrement les jeunes. Ces derniers ne sont que 14% en 2010 à déclarer connaître un ami, un parent, un collègue séropositif, contre plus de 25% des plus de 30 ans et 30% des jeunes en 2001. Le vih n’est pas incarné pour les jeunes d’aujourd’hui, bercés par le discours des médias et des experts qui parlent d’une maladie devenue chronique.
L’utilisation du préservatif est en baisse chez les jeunes. L’étude réalisée par la SMEREP en 2015 [6] dévoile que seulement 57% des étudiants utilisent toujours un préservatif lors de leurs rapports intimes et que 14% n’en utilisent jamais (1 sur 5 en Ile-de-France). Près de 75% des étudiants concernés par le changement de partenaire ne se font pas systématiquement dépister, résultat d’autant plus inquiétant chez les lycéens, puisque cela concerne 81% d’entre eux [7]. Les étudiants et lycéens, justifient leur comportement par le fait qu’ils considèrent ne pas avoir pris un risque suffisant en changeant de partenaire. Enfin c’est près d’1 lycéen sur 10 qui n’utilise jamais de préservatif.
Le préservatif apparaît comme un code, une norme d’entrée dans la sexualité, cependant c’est par la suite, une fois le premier rapport effectué, que l’utilisation du préservatif diminue. La nécessité de maintenir un niveau d’information élevé se fait ressentir.

Précarité, bien-être des étudiants

Les enquêtes commandées par la LMDE [8] et l’USEM [9] datant de 2015 montrent une précarité croissante chez les étudiants. Ces deux enquêtes reviennent sur les conditions financières des étudiants et sur leur impact tant sur la répartition de leur budget que sur leur bien-être. En matière de santé, l’enquête de la LMDE met en lumière un accès aux soins des étudiants en recul et un niveau de protection sociale insuffisant. On ne parle plus de report mais de renoncement aux soins. Un étudiant sur cinq dit renoncer à se soigner faute d’argent. 19% d’entre eux n’ont pas de complémentaire santé. On observe également des comportements à risque et un moral en berne. Outre la consommation excessive d’alcool ou le tabac, près de 4 étudiants sur 10 affirment aussi avoir « ressenti un sentiment constant de tristesse ou de déprime dans les douze derniers mois : perte d’intérêt pour tout, sentiment de tristesse durant toute la journée », selon l’enquête USEM.

Une prévention auprès de tous les jeunes qui doit également servir aux jeunes gays

Manque de conscience du risque vih/sida chez les jeunes gays

Il ne faut pas perdre à l’esprit que les jeunes gays ont grandi, ont été éduqué, dans le même monde que les autres groupes de jeunes, ainsi leurs connaissances autour du vih ne peuvent être que semblables. Certes certains de ces jeunes gays ont pu entrer en contact avec un public/des associations communautaires et donc ont peut-être perçu les enjeux du vih chez les gays, mais beaucoup des jeunes gays n’ont pas conscience de la prévalence du vih dans leur population. Dans un entretien accordé à la revue Transversal [10], le Dr Ohayon, directeur du centre de santé sexuelle le 190, pointe que ce manque de conscience est très inquiétant chez les jeunes gays alors même que l’incidence de l’infection par le vih est 200 fois plus élevée chez les gays. Comme pour tous les jeunes, un besoin d’information et de sensibilisation de ces jeunes gays se fait sentir.
Notre association de lutte contre le vih constate que les jeunes gays ont tout de même plus conscience du virus que leurs amis hétéros. Ils ont compris de manière plus ou moins éloignée qu’il y avait un danger quelque part et qu’il avait touché et touche leurs aînés. Mais parce qu’ils ne veulent pas être renvoyés au sida, parce qu’ils ne veulent pas qu’on continue à leur coller à la peau le sida, du fait qu’ils sont gays, ils entrent dans une négation du virus, ne veulent pas le voir et ainsi peuvent prendre des risques. Cette réaction qui consiste à ne pas vouloir considérer que le virus est là prend sa source dans les discriminations qu’ils subissent. Les jeunes gays et bis sont victimes d’homophobie et de biphobie, une discrimination sur leur sexualité qui les fragilisent, leur fait perdre leur estime d’eux. Lutter contre cela est la clé de la prévention à notre sens.
De même l’association constate qu’une catégorie de jeunes gays d’aujourd’hui ne veulent pas qu’on les rentre dans une case « communauté gay », ce que le Net Gay Baromètre dit aussi à sa façon. Les jeunes gays ne veulent plus des représentations communautaires du passé. Il faut considérer cela dans un contexte où les modes de rencontre changent. Les rencontres commencent par un échange virtuel via des applications ou des sites de rencontre gay. Les lieux de rencontre gay (bars, boites…) voient leur fréquentation diminuer et ferment de plus en plus. L’application Tinder, héritière de l’application gay Grinder, en version hétéro est également très utilisée par les gays, autre signe que la case gay n’est pas appréciée par tous.

Prévention ciblée auprès des jeunes gays

De part les préoccupations qu’ils ont quant aux nombreuses discriminations dont ils sont victimes (discriminations qui peuvent d’autant plus atteindre étant donné le jeune âge), de part leurs habitudes (nombre de partenaires, pratiques à risque, consommation de produits, relations tarifées), de part leur méconnaissances du virus et de sa prévalence, les jeunes gays apparaissent particulièrement comme vulnérables face au vih. Il semble évident que des campagnes de prévention ciblées vers eux ont un intérêt, voire même des préventions ciblées pour certains groupes de jeunes gays, étant donnés la disparité de leurs comportements et habitudes.
La part des jeunes parmi les publics bénéficiant des actions communautaires mises en œuvre par les associations est conséquente, mais le CNS dans son rapport a pu constater que les publics jeunes ne constituent pas en eux-mêmes une cible spécifique [2]. Ainsi, de nombreux TROD réalisés dans le cadre des actions de dépistage communautaire concernent des jeunes de 18 à 25 ans, mais c’est au travers d’une offre ciblée en direction de différents publics spécifiques (HSH, migrants…), et non sur des critères d’âge, que ceux-ci ont été atteints. Cette approche est cohérente avec la démarche communautaire ciblant des publics spécifiques, mais interroge néanmoins sur la capacité de ces actions à atteindre une partie croissante des publics jeunes concernés, peu sensibles à la notion d’appartenance ou d’identité communautaire.

Ce que la prévention auprès de tous les jeunes doit également faire pour les jeunes gays

Pour inverser les tendances à la hausse au sein du groupe des jeunes gays, au-delà d’une prévention ciblée pour ce public, la prévention faite auprès de tous les jeunes doit être appropriée et prendre en compte cette minorité.
La difficulté à aborder à l’école la diversité des sexualités fait obstacle à l’apprentissage de la prévention et du dépistage des IST chez les jeunes, notamment chez les jeunes gays. Par ailleurs, la séparation fréquente des thématiques abordées selon le genre, même lors d’interventions d’éducation à la sexualité mixtes ne permet pas une approche partagée de la prévention des IST. Par exemple les problématiques concernant les jeunes filles telles que la contraception et la pilule sont traitées en parallèle des problématiques concernant les jeunes garçons telles que le préservatif. Le rapport du CNS met en évidence une éducation à la sexualité qui ne tient pas assez compte de la diversité des jeunes et de leurs sexualités.
La prévention faite auprès des jeunes doit également accorder une place à la sensibilisation à l’homophobie et la transphobie et à leur impact sur la vie des personnes discriminées, sur leurs santés et leurs éventuelles prises de risque. Les recommandations du CNS commencent à aller dans ce sens (Recommandation 23 : inclure dans la formation des professionnels agissant auprès des jeunes l’effet d’impact négatif sur la santé sexuelle des discriminations liées à la diversité des sexualités, des orientations sexuelles et des identités de genre ; Recommandation 24 : renforcer les connaissances de l’ensemble des intervenants de la lutte contre les IST chez les jeunes sur les déterminants actuels de vulnérabilité et de risques accrus aux IST liés à la diversité des sexualités, des orientations sexuelles et des identités de genre).

Notes de l'article :

[1] Découvertes de séropositivité vih chez les jeunes en France 2003-2013, InVS, 2015

[2] Avis suivi de recommandations sur la prévention et la prise en charge des IST chez les adolescents et les jeunes adultes, CNS, 2017

[3] Sondage Harris Interactive pour le SNDV, 2016

[4] Sondage Ifop et Bilendi pour Sidaction, 2016

[5] Enquête sur les connaissances, les attitudes, les croyances, et les comportements (KABP) face au vih de la population générale adulte, renouvelée en 2010

[6] Etude OpinionWay pour la SMEREP auprès d’étudiants par questionnaires en ligne, 2015

[7] Etude OpinionWay pour la SMEREP auprès de lycéens par questionnaires en ligne, 2015

[8] 4ème Enquête Nationale sur la Santé des Etudiants, La Mutuelle Des Etudiants (LMDE), réalisée par l’IFOP, 2015

[9] Enquête pour l’Union nationale des mutuelles étudiantes régionales (USEM), réalisée par le CSA, 2015

[10] Destombes C., Découvrir son infection aujourd’hui, Transversal, 2015, n°77, pp. 20-21

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Ce que l’on retient du rapport du CNS

Le CNS a bien sûr mis en évidence des évolutions de comportements et de pratiques à risque dans certaines sous-populations de jeunes. Les groupes qui ont attiré son attention, où l’épidémie de vih n’est pas contrôlée, sont les jeunes HSH et les jeunes économiquement défavorisés qui ont moins souvent recours que les autres au dépistage et à la prise en charge des IST. Par ailleurs, le CNS propose de renforcer les stratégies de prévention des IST chez les jeunes dans une approche positive de la santé sexuelle plutôt qu’une information centrée sur les risques liés à la sexualité.
Concernant le système éducatif : le contraste entre les ambitions des objectifs inscrits dans la réglementation et leur concrétisation dans les établissements apparait important. Ainsi il est rapporté que seuls 10 à 21% des élèves du second degré reçoivent le nombre de séances d’éducation à la sexualité prévues par la loi. Les interventions uniques de deux heures, telles qu’elles sont souvent appliquées une ou deux fois au cours de la scolarité, sont insuffisantes. (Recommandation 9 : respecter le format des interventions d’éducation à la sexualité inscrit dans la loi, d’au moins trois séances de deux heures par an).
Au niveau universitaire, alors même que le renoncement aux soins des étudiants est important, les services universitaires ou interuniversitaires de médecine préventive et de promotion de la santé (S(I)UMPPS) n’ont souvent pas les moyens d’assurer des interventions collectives portant sur la prévention des IST (des recommandations de financements de ces structures sont alors faites).
L’analyse des conditions d’accès aux préservatifs montre qu’il n’existe pas de positionnement institutionnel sur la question de la mise à disposition des préservatifs dans les collèges (Recommandation 14.2 : conduire une réflexion concernant le principe de leur mise à disposition dans les collèges). L’accès aux préservatifs par distributeurs dans les lycées soulève la question de leur lieu d’implantation pour un accès confidentiel (Recommandation 14.1 : assurer leur mise à disposition dans les lycées (distributeurs, infirmerie) permettant un accès simple et confidentiel).
Concernant le système de santé : les médecins généralistes bénéficient peu d’une coordination territoriale et d’une incitation susceptibles de faciliter et de valoriser leur rôle dans la lutte contre les IST chez les jeunes (Recommandation 17 : conforter et organiser la participation des médecins généralistes à la lutte contre les IST chez les jeunes ; Recommandation 17.5 : financer l’accès aux TROD pour les médecins généralistes qui le souhaitent).
Les CeGIDD se heurtent à des difficultés de plusieurs ordres, liées à des contraintes financières qui entravent leurs capacités à assurer leurs missions (Recommandation 32.1 portant sur leur financement) et à l’obligation faite aux mineurs qui désirent bénéficier d’une pratique confidentielle de tests de dépistage d’être accompagnés d’un adulte de référence (Recommandation 18.1 : lever l’obligation d’accompagnement par un adulte du mineur souhaitant garder le secret sur son état de santé).
Enfin, dans le cadre de l’offre de soin, le CNS a souhaité évaluer l’importance de l’offre dématérialisée de prévention et de dépistage des IST. En effet, les innovations en matière d’offre numérique de prévention sont à faire, aux vues de la grande utilisation d’internet par les jeunes. En matière de dépistage, l’offre dématérialisée en ligne peut être de deux types : autotest et auto-prélèvement. L’autotest vih semble rencontrer un réel succès. L’auto-prélèvement a été expérimenté pour le dépistage de chlamydia, et a été considéré comme efficace pour amener la population concernée au dépistage, notamment les jeunes. Elle n’est pourtant pas accessible en routine, alors qu’elle l’est dans certains pays, y compris pour d’autres IST. Les dépistages par auto-prélèvement sont susceptibles d’être livrés à domicile après commande sur internet en l’absence de prescription et répondent au souci de confidentialité (Recommandation 27.1. Mettre en œuvre le dépistage des IST par auto-prélèvement ; Recommandation 27.2 : Contrôler le prix des autotests vih accessibles légalement sur les sites internet des pharmacies).
Mobilisation institutionnelle et cohérence des actions publiques : Au niveau régional, il a été relevé la priorité insuffisante accordée par certaines Agences Régionales de Santé au pilotage et à la coordination de la lutte contre les IST chez les jeunes, alors même que cela fait partie de leurs missions. De même l’éducation à la sexualité n’est pas portée de façon prioritaire au sein des rectorats, et la coordination entre les ARS et les rectorats reste insuffisante. L’absence de financement spécifique concernant l’éducation à la sexualité en milieu scolaire conduit à une offre insuffisante de formation et à une forte limitation du recours à des organismes extérieurs pour intervenir auprès des élèves. D’autre part, des contraintes financières entravent l’offre de soins dans le domaine de la lutte contre les IST chez les jeunes à différents niveaux : opérateurs publics (en particulier CeGIDD et Plannings familiaux), médecins généralistes et interventions associatives.
En absence de déclaration obligatoire, la surveillance épidémiologique des IST hors vih repose sur des données transmises par des réseaux sentinelles volontaires de cliniciens et de laboratoires. L’exhaustivité insuffisante limite le champ et la robustesse de certaines analyses (Recommandation 33 : renforcer les réseaux de surveillance des IST afin d’inclure un plus grand nombre de cas diagnostiqués).
Le rapport du CNS fait aussi une analyse et des recommandations concernant les vaccinations des adolescents et des jeunes adultes contre les IST (HPV, VHB, VHA et méningocoque C). En effet, la question des jeunes est très liée à la question de la vaccination. Concernant le HPV, auquel le bulletin Réact’up n°16 est consacré, on ne peut que se réjouir d’une recommandation du CNS qui demande à favoriser l’accès de l’ensemble d’une classe d’âge (c’est-à-dire garçons et filles) à la vaccination anti-HPV, alors qu’aujourd’hui seuls les jeunes filles et les HSH de moins de 26 ans sont concernés par une recommandation de vaccination.
Bon nombre de recommandations du CNS ont été entendues et se retrouvent dans la nouvelle stratégie nationale de santé sexuelle (agenda 2017-2030), sortie fin mars 2017. Outre une vaccination universelle filles et garçons contre le HPV, l’approche globale et positive de la santé sexuelle fait partie des orientations. Les cibles choisies sont ambitieuses, puisqu’il est visé : « 100 % des jeunes ont reçu une éducation de qualité à la sexualité et aux risques liés (IST, grossesses non prévues) au cours de leur cursus en primaire et secondaire ». Nous attendons maintenant un courage des politiques pour mettre en œuvre ces mesures.