Par ailleurs, dans ce groupe, 27 de ces hommes étaient sous thérapie antirétrovirale, ce qui a permis aux chercheurs de voir quel est l’effet des thérapies sur le taux de virus retrouvé dans les sécrétions des muqueuses rectales.
Nous vous présentons ici, une nouvelle étude qui montre que les niveaux d’ARN viraux dans les sécrétions rectales sont plus forts que dans le plasma sanguin ou séminal, chez des hommes séropositifs qui ont des rapports sexuels avec des hommes et ce, que ces hommes soient sous thérapie antirétrovirale ou non.
Questionnement scientifique et hypothèses avancées
Des études précédentes ont montré que la charge virale dans ces sécrétions est souvent retrouvée à des niveaux élevés, même chez les hommes sous traitement antirétroviral. L’étude prospective présentée ici a été réalisée dans le but de déterminer quelle est l’importance de la charge virale des muqueuses rectales, par rapport à la charge virale du sang et du sperme.
Méthodologie
Dans cette étude, les thérapies antirétrovirales des participants variaient considérablement : tous les hommes recevaient au moins 1 inhibiteur nucléosidique de transcriptase-inverse, 80% recevaient un inhibiteur de protéase, et 36% recevaient un 1 inhibiteur non-nucléosidique de transcriptase-inverse. Les résultats obtenus ici indiquent que la thérapie antirétrovirale est corrélée avec une diminution des niveaux d’ARN viraux dans le liquide séminal, ce qui est cohérent avec les rapports précédents.
En comparaison, les hommes qui ne recevaient pas de traitement avaient des taux de détection plus forts dans le sang (100%), dans les sécrétions rectales (95%) et dans le liquide séminal (78%). Ce qui indique que les traitements permettent de diminuer les taux de virus dans le sang, le sperme et les sécrétions rectales. Par ailleurs, certains participants ont eu des charges virales détectables intermittentes dans leurs sécrétions rectales (2 participants sous thérapie, 6 sans traitement) et dans le liquide séminal (7 participants sous thérapie, 4 sans traitement). Ce qui semble indiquer que les taux de virus varient et ne sont pas stables au cours de temps.
Résultats
Afin de déterminer, de manière statistique, quel est l’effet de la thérapie antirétrovirale, les scientifiques ont utilisé deux modèles en incluant ou non, la charge virale sanguine. Les résultats ont montré que, de manière générale, la thérapie antirétrovirale est associée à une diminution significative des niveaux de virus dans le sang, le liquide séminal et les sécrétions rectales. Cependant, lorsqu’on inclut la charge virale plasmatique sanguine dans le modèle statistique, on n’observe plus de diminution significative des niveaux d’ARN viraux dans les sécrétions rectales. Ceci suggère que l’effet des antirétroviraux sur la charge virale rectale se fait via son effet sur la charge virale sanguine.
Ainsi, dépendamment d’un effet sur la charge virale sanguine, la thérapie antirétrovirale a un effet sur la charge virale séminale, mais n’en a presque plus sur la charge virale des sécrétions de la muqueuse rectale. Ceci pourrait être dû à des concentrations différentes d’antirétroviraux ou à des différences anatomiques et immunologiques des voies génitales par rapport à la muqueuse rectale.
Discussion des résultats
Jusqu’alors, des études ont montré que la charge virale dans les sécrétions rectales est souvent retrouvée à des niveaux élevés, même chez les hommes sous traitement antirétroviral. Cependant, la plupart des études réalisées à ce jour ont été faites à partir de biopsies (prélèvement d’un échantillon de tissu) dans lesquels on détectait souvent beaucoup de virus , même chez des personnes présentant des charges virales plasmatiques indétectables. Il s’est posé la question de savoir si ces échantillons étaient représentatifs des quantités de particules virales contenues dans les sécrétions des muqueuses rénales auxquelles sont exposés les partenaires sexuels actifs.
Dans l’étude que nous vous présentons ici, les scientifiques ont choisi d’utiliser des Sno-strips (sorte de coton-tiges utilisés pour les frottis vaginaux) pour effectuer les prélèvements de la muqueuse rectale. Par cette méthode, ils ont détecté des niveaux d’ARN viraux à des taux similaires à ceux retrouvés dans les biopsies et des taux plus élevés que dans une étude où des tampons anaux avaient été utilisés pour effectuer les prélèvements.
Ces données sont très importantes, car elles montrent que les charges virales retrouvées dépendent du mode de prélèvement des échantillons. Ainsi, alors qu’on pensait que la charge virale des sécrétions rectales pouvait être surestimée lorsqu’on étudiait des biopsies, cette étude montre qu’au final, les sécrétions des muqueuses rectales contiennent de forts taux de virus.
Ainsi, il semblerait que des niveaux plus élevés de virus dans les sécrétions rectales et dans le liquide séminal augmentent le risque de transmission du VIH, bien que les seuils de charge virale de transmission n’aient pas encore été démontrés. Cependant, on ne connaît encore que peu de choses sur les facteurs qui influencent les niveaux de virus dans les sécrétions des muqueuses. Toutefois, il semblerait que certains facteurs comme les co-infections (virales ou bactériennes), et les facteurs comportementaux pourraient influencer les taux d’ARN viraux dans ces sécrétions et nécessitent des études plus approfondies.