La vaccination peut prévenir certaines infections sexuellement transmissibles (IST) d’origine virale : l’hépatite A, l’hépatite B, le papillomavirus humain certainement. D’autres vaccins existent ou sont à l’étude.
Pour les gays, un certain nombre de vaccins sont particulièrement utiles compte tenu de la prévalence des maladies qui circulent dans la communauté et contre lesquels ils protègent.
La politique vaccinale du ministère de la santé rend 11 vaccinations obligatoires pour les enfants nés à partir du 1er janvier 2018 et jusqu’à l’âge de 2 ans. Ainsi les enfants doivent être vaccinés (sauf contre-indication médicale reconnue) contre ces 11 maladies, parmi lesquelles l’hépatite B et le méningocoque C, pour pouvoir être admis en crèche, à l’école, en garderie…
REACTUP s’est dit qu’une petite piqure de rappel sur les vaccins recommandés aux gays ne ferait pas de mal dans ce contexte. D’autant plus que deux d’entre elles, les vaccinations hépatite B et méningocoque C, recommandées aux gays, sont maintenant obligatoires.
Dans cet article il sera question de :
- le papillomavirus
- l’hépatite A,
- l’hépatite B,
- le méningocoque C
- la vaccination des séropositif(ve)s
L’épidémie d’hépatite A chez les gays en 2017, où en est on à présent ?
Depuis février 2017, une épidémie d’hépatite A a été rapportée dans plusieurs pays européens, touchant en particulier les Hommes ayant des relations Sexuelles avec des Hommes (HSH). En France, l’hépatite A est surveillée par la déclaration obligatoire et par le Centre National de Référence (CNR virus des hépatites à transmission entérique). Du 1er janvier au 31 octobre 2017, 2980 cas d’hépatite A ont été déclarés. Le nombre de cas d’hépatite A déclarés au cours des 10 premiers mois de 2017 est quatre fois supérieur au nombre total de cas déclarés au cours de l’année 2016 (697 cas) [1].
Cette épidémie concerne majoritairement les hommes, qui représentent 2355 (79 %) des 2980 cas déclarés en 2017. La déclaration obligatoire d’hépatite A ne comporte pas l’orientation sexuelle dans le recueil d’informations. Le fait que l’épidémie ait concerné largement les HSH est cependant repérable par une augmentation du rapport entre les nouveaux cas chez les hommes et chez les femmes (sex ratio H/F), il est probable en l’absence d’autres facteurs de risque (autres cas ou enfants dans l’entourage, travail dans une collectivité à risque, séjour hors de France métropolitaine ou consommation de fruits de mer), ou s’atteste lorsque l’orientation sexuelle est documentée lors des investigations complémentaires faites suite à la déclaration obligatoire. Ainsi, chez les HSH métropolitains, le CNR a identifié 3 souches endémiques européennes.
Le nombre de cas d’hépatite A a diminué depuis août 2017 chez les hommes, et depuis septembre chez les femmes mais le sexe ratio H/F des 18-55 ans reste élevé. Il semble que le pic de l’épidémie soit survenu en juillet, mais la persistance d’un sexe ratio H/F élevé montre une persistance de la circulation de l’hépatite A chez les HSH. Précisons que l’épidémie d’hépatite A a touché à des degrés divers toutes les régions métropolitaines.
En plus de la déclaration obligatoire, une surveillance renforcée des cas d’hépatite A déclarés a été mise en place par les autorités au moyen d’un questionnaire annexé à la déclaration obligatoire, recueillant les comportements sexuels à risque et les modes de rencontre.
Les autorités sanitaires indiquent aussi que chaque déclarant (médecin et/ou laboratoire d’analyse médicale) est directement tenu informé par courrier individuel des recommandations vaccinales prioritaires prises par le Haut Conseil de la Santé Publique en date du 14 février 2017 (vaccination de l’entourage d’un cas confirmé et de la population HSH sans limite, dans un contexte d’épidémie et de pénurie de vaccins).
Sont également transmises aux médecins déclarant les coordonnées des CeGIDD (Centre Gratuit d’Information, de Dépistage et de Diagnostic) ainsi que celles des centres municipaux de vaccination.
L’ensemble des CeGIDD sont invités à proposer systématiquement et gratuitement le vaccin. Les CeGIDD et centres de vaccination sont prioritaires pour l’accès aux vaccins, un stock étant mis en réserve chez le fabricant sous le contrôle de l’ANSM (Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé). Par ailleurs, une campagne d’information a été lancée en direction du milieu gay avec le concours des acteurs associatifs concernés (voir sur REACTUP.FR : Alerte à l’hépatite A ).
Contexte de pénurie de vaccins : des pénuries de vaccins contre l’hépatite A et l’hépatite B sont régulièrement constatées, compte tenu de la politique de répartition mondiale de l’industrie pharmaceutique qui produit ces vaccins. La demande en vaccins des pays émergeants grandissant, et le principe de rareté augmentant les prix, explique les pénuries récurrentes.
Pour mémoire
Le principal mode de transmission de personne à personne se fait par voie oro-fécale. C’est ainsi que les rapports sexuels entre hommes peuvent permettre la contamination à l’hépatite A.
Après une incubation de 15 à 50 jours, l’hépatite aiguë A se manifeste par une fièvre, une fatigue importante avec des nausées, des douleurs abdominales puis d’une jaunisse. Les formes sans symptômes ou peu symptomatiques sont fréquentes. Il n’existe pas de forme chronique d’hépatite A. L’hépatite A est habituellement bénigne, mais peut cependant être à l’origine de formes graves, plus fréquentes chez l’adulte, d’autant plus chez les personnes séropositives.
Il existe un vaccin contre l’hépatite A qui confère une protection pendant une durée de 10 à 20 ans (si schéma vaccinal à 2 injections). La vaccination peut être effectuée même en période d’incubation.
Dans le calendrier vaccinal, une vaccination anti-hépatite A est recommandée notamment aux HSH et aux patients infectés chroniques par le virus de l’hépatite B ou porteurs d’une maladie chronique du foie (notamment due à l’hépatite C ou résultant d’une consommation excessive d’alcool).
Hépatite B chez les gays : très exposés, la vaccination est de mise
L’hépatite B se transmet par voie sexuelle, par contact direct avec du sang infecté par le virus de l’hépatite B ou d’une mère infectée à son enfant lors de l’accouchement. Les données de surveillance de l’hépatite B montrent que les cas les plus fréquemment rapportées sont dus à une exposition sexuelle (56 %) et à un séjour dans un pays d’endémicité à l’hépatite B (32 %). Dans les cas d’expositions sexuelles, sont rapportés ceux de personnes ayant des partenaires sexuels multiples (37 %), des rapports sexuels entre hommes (21 %) et le fait d’avoir un partenaire sexuel Ag Hbs positif [l’antigène Hbs est présent à la surface du virus de l’hépatite B] (13 %)[2].
Plus de 80 % des expositions potentiellement à risque relèvent d’une indication vaccinale et ces contaminations auraient pu être évitées si les recommandations vaccinales avaient été mieux suivies, s’agissant notamment des HSH [2]. Les résultats de l’enquête Prevagay 2009 qui interrogeait des hommes fréquentant les lieux de convivialité gay parisiens, ont révélé la prévalence de l’infection à l’hépatite B dans cette population. Parmi les 876 hommes retenus pour l’analyse de la prévalence, 12 étaient porteurs de l’antigène Hbs, soit une séroprévalence de 1,4%, bien supérieure à celle estimée dans la population masculine française (1,1%). Parmi ces 12 hommes, 7 étaient co-infectés par le VIH. La prévalence de l’antigène Hbs parmi les séropositifs pour le VIH (4,6% des 157 séropositifs) était donc presque 7 fois plus élevée que chez les séronégatifs (0,7% des 729 séronégatifs).
Il faut considérer ces chiffres avec les limites d’interprétation de Prevagay, c’est-à-dire notamment sur la représentativité de la population d’étude. Il s’agit d’une population d’HSH volontaires fréquentant des établissements de convivialité gay parisiens, un milieu dans lequel nombre de personnes séropositives est important et chez qui la couverture vaccinale contre l’hépatite B est un peu plus grande que dans la population générale.
De plus, cette population d’étude n’est pas représentative de la part d’HSH en situation de migration, pour qui la prévalence hépatite B doit être très grande puisqu’elle l’est dans la population migrante en générale et que les relations entre hommes sont un facteur d’exposition supplémentaire. L’enquête de prévalence de 2004 avait montré que la prévalence de l’hépatite B était 7 fois supérieure chez les migrants nés en zone de forte endémicité, telle que l’Afrique subsaharienne, que dans la population née en France métropolitaine [3].
Pour mémoire
L’hépatite B est une maladie infectieuse du foie potentiellement grave parce qu’elle peut devenir une maladie chronique. L’hépatite aiguë B peut passer totalement inaperçue dans près de 90% des cas. Sur les 10% restant, les hépatites B qui deviennent chroniques, une sur cinq environ va aboutir à une cirrhose du foie dans un délai de 10 à 30 ans.
Les principaux symptômes de l’hépatite aiguë B sont la présence de jaunisse, de fatigue, de perte de l’appétit, de douleurs abdominales et nausées, de vomissements. La période d’incubation de l’infection par le VHB est généralement de 45 à 180 jours.
La prévention de l’hépatite B repose sur le dépistage par sérologie et la vaccination chez le nourrisson, le préadolescent, et les personnes exposées dont font partie les HSH (recommandation au calendrier vaccinal).
Prévalence du Papillomavirus humain élevée chez les gays, vaccination recommandée seulement chez les jeunes gays…
En février 2016, le Haut Conseil en santé publique a recommandé qu’un accès au vaccin anti-HPV (Human papillomavirus) soit proposé dans les CeGIDD et dans les centres de vaccination, aux hommes de moins de 26 ans ayant eu des relations sexuelles avec d’autres hommes. Jusqu’à aujourd’hui les recommandations de vaccination ne concernaient que les jeunes filles : vaccination pratiquée entre 11 et 14 ans, avec rattrapage possible jusqu’à 20 ans. Cependant, les infections par les HPV au sein de nos minorités, gays, séropos et séronegs, trans, sont très présentes. La limitation actuelle de la vaccination aux seules jeunes filles, censée protéger leurs futurs partenaires sexuels par effet de groupe ne protège en fait les autres que dans un modèle exclusivement hétérosexuel. Elle ne protège pas des condylomes (verrues génitales) et cancers dus au HPV une population non vaccinée qui reste sexuellement fortement isolée. La prévalence d’HPV au niveau anal chez les gays est de 47 à 60%, contre 12% chez les hommes hétéros. Elle est de 90% chez les gays séropos contre 46% chez les hétéros séropos, [4] et [5].
L’extension récente de la vaccination aux jeunes gays de moins de 26 ans est vaine : combien d’entre eLLEux peuvent parler de leur orientation sexuelle à leur médecin, et se faire vacciner de leur propre initiative ? De plus, il faudrait vacciner les gays et les bis au cours de leur plus jeune âge, car la vaccination a sa plus grande efficacité lorsque la personne vaccinée n’a pas encore rencontré le virus HPV : c’est un argument de plus pour vacciner tous les garçons au même âge que les filles (voir sur REACTUP.FR : HPV, condylomes, cancers anaux, vacciner les garçons pour que cela cesse et le bulletin REACTUP n°16).
Pour mémoire
L’infection à HPV est l’infection sexuellement transmissible la plus fréquente, un simple contact d’une muqueuse à l’autre suffit à la transmission. Les condylomes sont des verrues d’origine virale localisées au niveau des muqueuses génitales ou anales, que cela soit à l’extérieur (pénis, vulve, anus, peau proche de l’anus, de l’utérus) ou à l’intérieur (col de l’utérus, vagin, anus et sphère orale). Le virus à l’origine de ces verrues (HPV) est responsable de condylomes et de lésions cancéreuses par une importante production tissulaire. L’usage du préservatif ne permet pas de se protéger efficacement des HPV, mais il protège des autres IST.
Et le méningocoque C dans tout ça ?
Intérêt pour les gays de se faire vacciner contre le méningocoque C
Différentes alertes sanitaires concernant le méningocoque C dans la population gay ont eu lieu régulièrement. La dernière remonte à 2013, commencée à New York, elle s’est produite également à Los Angeles et en Europe (3 cas en Ile-de-France, 2 cas à Berlin et 1 cas en Belgique). En France, en novembre 2014, sur saisie de la Direction Générale de la Santé, le Haut Conseil de la Santé Publique a émis en urgence un avis d’extension de l’âge de la vaccination contre les infections invasives à méningocoque C pour la population HSH au-delà de 24 ans. Cette extension de la vaccination se faisait pour une période d’un an. Elle a été prolongée d’une année supplémentaire, jusqu’à fin 2016, face à un manque de données, bien qu’une diminution de l’incidence d’infections invasives à méningocoque C avait été identifiée. En effet il n’était pas possible de dire si cette diminution était liée à la recommandation vaccinale aux HSH, ou à l’évolution naturelle de la circulation du méningocoque C dans la population.
La recommandation vaccinale aux HSH n’a pas été actualisée depuis. Ce qui est sûr, c’est que si vous avez moins de 25 ans, vous êtes invités à vous faire vacciner. Les études détaillées ont mis en évidence des cas d’infection à méningocoque du tractus uro-génital masculin liés vraisemblablement à une transmission sexuelle. Ainsi les méningocoques s’adaptent à leur environnement, ils peuvent devenir sexuellement transmissibles, par contact oro-génital (fellation) [voir sur REACTUP.FR : Méningocoque C : pourquoi les gays ont intérêt à être vaccinés].
Pour mémoire
Le méningocoque est un germe qui se transmet de personne à personne par les gouttelettes issues des sécrétions rhinopharyngées (salive et autres excrétions), le plus souvent en face à face, de moins d’un mètre. Le risque de transmission entre une personne infectée et une autre personne est faible. Cependant, le contact « bouche à bouche » ou lors d’un « baiser » est hautement contaminant quelle que soit la durée du « baiser ». Le méningocoque est un germe fragile qui ne survit pas dans le milieu extérieur.
Les recommandations concernant la vaccination contre le méningocoque C sont : vaccination du nourrisson et rattrapage possible jusqu’à 25 ans si non vaccinés dans les premières années de vie.
Vaccination des personnes séropositives
Il est préférable de vacciner lorsque la charge virale VIH est indétectable et si possible quand le taux de CD4 est supérieur à 200/mm3, pour que la réponse immunitaire attendue par la vaccination soit la meilleure.
Pour les gays séropos, la recommandation de vaccination conte l’hépatite A et l’hépatite B est la même que pour tout les gays.
L’intérêt de vacciner les adultes séropos contre le papillomavirus Humain n’est pas certain, du fait d’avoir déjà été à coup sûr en contact avec le virus dans leur vie sexuelle et de la moins bonne réponse immunitaire. Pour les garçons et les filles infectés par le VIH, la vaccination anti-HPV est recommandée aux mêmes âges que les autres avec le vaccin quadrivalent et un schéma à 3 doses.
Enfin, la vaccination annuelle contre la grippe et la vaccination antipneumocoque tous les 5 ans sont également recommandées pour les personnes vivant avec le VIH (recommandations du groupe d’experts Morlat).
Tableau des vaccinations
(cliquez sur l’image pour l’agrandir…)
Notes de l'article :
[1] Epidémie d’hépatite A en France et en Europe, Point de situation au 13 novembre 2017, Santé Publique France
[2] Vaux S., Pioche C., Brouard C., Pillonel J., Bousquet V., Fonteneau L., Brisacier A.-C., Gautier A., Lydie N., Lot F. Surveillance des hépatites B et C. Saint-Maurice : Santé publique France ; 2017. 28 p.
[3] Larsen C, Pialoux G, Salmon D, et al. Prévalence des co-infections par les virus des hépatites B et C dans la population VIH+, France, juin 2004. Bull Epidemiol Hebd 2005 ; 23 : 109-12.
[4] Nyitray AG et al. J Infect Dis. 2011 Jan 1 ;203(1):49-57.
[5] Piketti C et al. Ann Intern Med 2003.
Il ne faut pas voir la vaccination comme une option qu’on peut choisir ou ne pas choisir. Sauf contre-indication médicale, il n’y a pas de mauvais côtés à se faire vacciner. Des croyances quant à des effets négatifs de vaccins n’ont jamais été prouvées et relèvent des peurs. Prendre soin de sa santé c’est se faire vacciner, sans attendre, sans se dire qu’on le fera une prochaine fois.
Il n’existe pas de vaccin contre l’hépatite C.