DÉPÊCHES / PRÉVENTION

L’Europe, la crise et la prévention

par | 12.04.2013

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C’est une question souvent laissée en suspens, mais qu’on ne peut ignorer lorsqu’on s’intéresse à la prévention et plus généralement à la prise en charge sanitaire : quels sont les effets de la crise sur nos santés ?

Un article du Lancet fait le point sur la situation en Europe, en se focalisant notamment sur les conséquences de la crise en termes de suicides et de contaminations au VIH.

Tout d’abord, les auteur-e-s rappellent le lien entre les indicateurs socio-économique de la crise, notamment la hausse du taux de chômage (qui a augmenté entre 2007 et 2010 de 3 % au Portugal, de 4 % en Grèce et de 12 % en Espagne, par exemple) et les politiques d’austérité (imposées aux États par les institutions financières – Banque centrale européenne, Fond monétaire international, etc.). Or, ces politiques de crise ont amené de fortes restructurations du secteur hospitalier, une baisse de certains crédits, et notamment ceux qui étaient jusqu’alors alloués à la prévention : les coupes budgétaires sont prioritairement réalisées envers les « publics » non malades des institutions, et non envers les malades, dont on essaye de maintenir le niveau de soin.

En Grèce, par exemple, les coupes budgétaires (qui ont affecté les hôpitaux à hauteur de 40 % de leur budget) ont fortement touché la prévention du VIH/sida, notamment en ne fournissant plus le matériel d’injection stérile pour les usagers de drogue. Le résultat ne s’est pas fait attendre, puisqu’on a observé une hausse impressionnante des contaminations, en particulier chez les usagers de drogues, mais aussi chez les gays

Epidemio VIH Grece 2001 11

Source : Publication de European Centre for Disease Prevention and Control

Bien-sûr, le manque de recul sur cette situation qui ne semble pas en passe de s’améliorer pose question : comment les pouvoirs publics peuvent-ils maintenir un fort niveau de prévention en temps de crise ? Doit-on « prioriser » les actions de santé publique ? Les coupes budgétaires sont-elles réellement une fatalité ?

Sans répondre à ces questions, les auteur-e-s, plutôt pessimistes, soulignent toutefois la réaction salutaire des communautés médicales les plus touchées par la crise, comme les médecins espagnols refusant d’arrêter de soigner les étrangers malades. Ils fustigent en revanche le silence des autorités sanitaires européennes sur les effets de la crise et sur les politiques publiques d’austérité qu’elles mettent en œuvre dans le domaine de la santé.

Et puis, en complément de cet article, il est toujours bon de rappeler que la prévention est aussi une mesure de réduction des coûts de santé, ce que les visions budgétaires à court terme ont parfois tendance à oublier.

Source :

Marina Karanikolos, Philipa Mladovsky, Jonathan Cylus, Sarah Thomson, Sanjay Basu, David Stuckler, Johan P Mackenbach, Martin McKee, « Financial crisis, austerity, and health in Europe », The Lancet, 27 mars 2013.