DÉPÊCHES / ÉPIDÉMIOLOGIE

VIH et IST à Londres : quelques chiffres qui font réfléchir…

par | 26.12.2012

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  • par Jérémy C-S

Passé le 1er décembre (pour ceux qui manifestaient), passé l’inévitable accablement provoqué par les chiffres de l’INVS (pour ceux qui s’y intéressent), passé l’inévitable diffusion d’un volume de Kill Bill (pour ceux qui s’ennuient comme nous dans leurs familles), on trouve enfin le temps de regarder ce qu’il se passe chez nos amis européens. Aujourd’hui, arrêtons-nous brièvement sur le Royaume-Uni.

L’Agence de protection sanitaire anglaise (Health Protection Agency ou HPA) nous apprend (ou ré-apprend) qu’1/5 des gays diagnostiqués séropositifs sont aussi porteurs d’une infection sexuellement transmissible type chlamydiae ou gonorrhée. Tout aussi inévitablement, on les mettra en comparaison avec un hétéro sur 25 et une hétéro sur 30. Or ceux qui sont simultanément porteurs du VIH et d’une IST aiguë sont significativement plus contagieux que les autres et contribuent à la persistance d’un taux élevé de transmission du VIH dans la communauté gay.

L’Agence précise aussi que parmi les gays et bisexuels fréquentant des cliniques de santé sexuelle, ceux atteints de chlamydia ont été trois fois plus susceptibles de contracter le VIH l’année suivante et ceux atteints de gonorrhée presque deux et demi fois plus susceptibles de contracter le VIH à l’année suivante. Autrement dit, mauvaise nouvelle : un séroneg qui se fait diagnostiquer une IST présente le profil type du futur nouveau séropo.

Il n’est dès lors guère étonnant que pour la première fois, depuis 1999, les HSH avec 3010 contaminations, dépassent le nombre d’hétérosexuels diagnostiqués séropositifs.

Ainsi au Royaume-Uni :

  • 1 HSH sur 20 vit avec le VIH
  • 1 HSH sur 12 est séropo à Londres
  • 1 HSH sur 5 ignore qu’il est séropo
  • 1 HSH sur 5 diagnostiqué séropositif au VIH est diagnostiqué en même temps avec une IST
  • 1 HSH sur 4 (23%) récemment diagnostiqué a été aussi récemment infecté (4-6 mois) ce qui tend à montrer une dynamique difficilement contrôlable de l’épidémie chez des personnes fréquemment dépistées…

La National Aids Trust (NAT), principale association de lutte contre le sida au Royaume-Uni se veut très ferme quant à l’analyse de ces données, et on peut la comprendre : « Les infections sexuellement transmissibles sont inextricablement liées à la propagation du VIH. […] Lorsque vous êtes un homme séronégatif homosexuel et que l’on vous diagnostique une IST, vous devez vraiment considérer cela comme un appel au réveil […] car ces données montrent que vous risquez sérieusement de contracter le VIH dans un proche avenir, et qu’il vous revient de prendre conscience de la nécessité d’empêcher que cela se produise, par l’utilisation systématique du préservatif et la réduction du nombre de partenaires sexuels ».

À reactup.fr, a fortiori en cas de virée pédé à Soho (notons au passage que l’incidence comme la prévalence du VIH/sida continuent d’être plus élevées à Londres que nulle par ailleurs au Royaume-Uni), on vous conseillera d’abord :

  • D’utiliser systématiquement des préservatifs lors de vos rapports sexuels ;
  • D’utiliser ces capotes avec du gel, car c’est toujours plus sympa par pour vos partenaires passifs et leur muqueuse anale ;
  • De ne pas oublier que les fellations en général, et les éjaculations buccales en particulier, constituent aussi un rapport à risque. Dans les saunas et les backrooms, vous savez encore moins qu’ailleurs où vient de trainer la bite que vous vous apprêtez à sucer, ou ce qu’a reçu dans la glotte la bouche qui s’apprête à vous accueillir.
  • En cas de rupture du préservatif, de vous diriger aux urgences, et de demander un traitement d’urgence post-exposition au VIH (ou Prophylactic treatment for HIV) ;
  • De vous faire dépister régulièrement (tous les deux-trois mois), outre le VIH, les hépatites, les gonocoques, les chlamydiae, la syphillis, papillomavirus. N’hésitez pas à demander un écouvillonnage pharyngé, urétral ou anal : certaines IST peuvent être asymptomatiques et nécessitent des prélèvements biologiques, à minima un examen visuel de la part d’un professionnel de santé.

Rappelons aussi pour les hommes séropositifs sous traitements la nécessité de continuer à se protéger car :

  • Une IST peut augmenter votre charge virale, et votre traitement ne vous protège pas des IST, ni d’autres souches du VIH (vous savez, c’est cette histoire moins à la mode de surinfection, mais bien à la mode pour ceux qui doivent y faire face, avec l’augmentation de leur charge virale, et leur échec thérapeutique parce que la souche de leur second virus est résistant aux antirétroviraux. That’s not cool.)
  • Un traitement antirétroviral bien observé rend moins contaminant. Mais être moins contaminant ne signifie pas n’être plus du tout contaminant (attention aux raccourcis !).
  • L’hépatite C se transmet aussi par voie sexuelle, votre traitement ne vous y immunise en rien, or une co-infection VIH/VHC entraine des complications thérapeutiques et physiques lourdes, c’est la dernière des choses à vous souhaiter.

Aussi, laisserons-nous en conclusion la parole au NAT : « Un des principaux enseignements du rapport de l’Agence est que si vous ne prenez pas au sérieux les IST, vous ne prenez pas au sérieux le VIH. On peut être traité et guérir de la plupart des IST, mais ce serait une grave erreur de considérer qu’elles sont simplement un « risque professionnel » de la vie gay ». Car effectivement, la propagation du VIH comme des IST ne sont que la conséquence de pratiques sexuelles non safe, et leur banalisation. De quoi inévitablement être de nouveau accablé, mais par les chiffres de la HPA cette fois, inévitablement regarder un autre volume de Kill Bill, inévitablement s’interroger sur une épidémie qui ne cesse de se généraliser dans la communauté gay. Et de toute évidence, pas seulement en France.

Vous avez dit Happy New Year ?!

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